« Verbaliser » constitue un des plus puissants ciments pour un pacte familial accepté et pérenne, la preuve par ce récit d’une donation-partage qui, sans le secours de la médiation familiale et patrimoniale, aurait pu tourner court.

Récit.

Un couple d’agriculteurs prévoyant et bien attentionné, prend rendez-vous avec son notaire pour effectuer une 2e donation-partage* au bénéfice de ses deux filles (que nous appellerons Véronique et Virginie), quelques années après une première donation-partage d’une partie de leurs biens. Monsieur décède brutalement avant la signature de cette donation. Sa conjointe décide alors de poursuivre dans la voie tracée du vivant de son époux. Mais Virginie s’oppose à ce projet, estimant que le partage prévu par son père est inégalitaire à son égard, les biens reçus lors de la première donation-partage étant, pour ce qui la concerne, des parcelles agricoles, alors que celles reçues par sa sœur Véronique sont devenues des terrains à bâtir.

(Parenthèse "le dico du droit")

La donation-partage est un procédé juridique permettant de prévoir une répartition des biens de manière anticipée entre ses héritiers. Ce pacte familial revêt des avantages fiscaux et limite le risque de conflits susceptibles de survenir au moment du décès des légataires, toutes les parties devant s’accorder sur les modalités de transmission.

Dans le contexte précédemment évoqué, le partage successoral n’a pas pu aboutir et les biens sont restés dans l’indivision successorale. Le notaire de la famille a conseillé de recourir à une médiation, ce que la mère et ses 2 filles ont accepté.

 

3 mois et 3 séances seulement, expertise comprise, pour déverrouiller le pacte

 

Pour cette famille, la médiation a tenu ses promesses en 3 rendez-vous seulement.

Lors de la 1ère réunion de médiation, il a été décidé d'évaluer tous les biens (ceux transmis lors de la première donation-partage ainsi que ceux restant dans la succession du père). Déjà, les premiers effets de la médiation se sont fait sentir : Véronique, la sœur avantagée, a pu mesurer l’impact de la frustration de sa sœur Virginie. La mère, d’abord fidèle aux volontés de son mari, s’est montrée plus encline à changer de vue, proposant d’elle-même de rééquilibrer la situation entre ses filles. Elle a ainsi fait valoir que si aucun accord ne survenait dans le cadre de la donation-partage, elle prendrait la décision de faire bénéficier par voie testamentaire la sœur lésée Virginie, de la quotité disponible.

Cette nouvelle voie étant ouverte, le médiateur a procédé à une série de questionnements avisés, ainsi qu’à un aparté, après lequel Virginie a finalement avoué son véritable besoin, tenu secret jusqu'ici. À savoir : se voir attribuer en totalité et en pleine propriété le corps de ferme qu’elle occupe en tant qu’exploitante agricole. De son côté, Véronique avait deviné la réelle motivation de sa sœur mais attendait que celle-ci se prononce clairement. Quand ce fut chose faite, la situation s’est naturellement débloquée et la donation-partage a pu être réalisée sur cette base.

Enfin, pour clore la médiation, le médiateur les a enjoints de ritualiser et consacrer cet accord par un acte concret et symbolique permettant de reprendre des relations normales. Véronique et Virginie ont choisi d’organiser un repas de famille au jour anniversaire du décès de leur père, permettant du même coup à leur mère de recouvrer la sérénité, et la conviction que ses filles ne se déchireraient pas, après sa disparition.

 

On refait le match ?

Sylvie Mombellet, votre médiatrice familiale et patrimoniale, analyse ce qui s’est réellement joué dans le cas présenté et en quoi la médiation a sauvé le pacte.

 

« La plupart du temps, quand ils sont face à leurs parents, les enfants n’osent pas refuser les modalités d’attributions des biens, par pudeur, par respect, par devoir d’obéissance, ou tout simplement par politesse.

De fait, tant que les parents sont là pour rappeler à la fratrie qu’il faut se respecter et s’entendre, le pacte semble acquis. Mais dès lors qu’ils sont affaiblis ou disparaissent, il n’est pas rare de voir la fratrie voler en éclats, et le pacte avec.

Il me semblerait judicieux par conséquent de prévoir une médiation patrimoniale lors de la donation-partage conjonctive c’est-à-dire effectuée par le couple et ne pas attendre le premier décès d’un des parents pour y faire appel.

En effet, certaines rancœurs peuvent remonter à la petite enfance, un des membres de la fratrie a pu se sentir désavantagé·e par rapport à ses frères et sœurs et lors de cette donation-partage par les parents… le sentiment d’injustice jusqu’au décès refoulé, s’exacerbe alors, exactement comme dans notre récit.

Avec la médiation, la donation-partage peut enfin reposer sur un accord réel et non-feint, donc solide.

Les parents soucieux d’organiser leur succession de leur vivant, ont ainsi tout intérêt à recourir à un médiateur patrimonial pour les réunir avec tous leurs enfants et discuter ouvertement des attributions à chacun·e de manière à trouver des solutions satisfaisantes pour tous. De la même manière, si les parents optent pour avantager l’un des enfants, situation toujours mal vécue par les autres qui s’estiment lésés, ils pourront avec la médiation expliquer la raison de ce choix. »

La médiation familiale et patrimoniale permet de mettre en présence les parties, d’offrir à chacun·e un espace de parole franc et sincère, afin que l’accord relatif à la succession repose sur des bases communes et librement partagées. Une démarche efficace, qui sécurise pour longtemps et permet de s’en aller plus serein, lorsque la fin de vie approche.   

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