Un couple de Français est installé au Royaume-Uni. Suite au Brexit, il souhaite revenir vivre en France. Quid de son régime matrimonial et de la loi dont il dépend ?
Et si c'était nous ?
Petite leçon de droit international de la famille appliqué à la vraie vie, par Sylvie Mombellet
Après s'être marié sans contrat en France en 2010, ce couple a décidé de traverser la Manche. Il s'est installé en Angleterre, sans avoir choisi la loi applicable à son régime matrimonial, dont il dépendrait. Par cette absence de choix, il est rattaché de fait au régime anglais, considéré comme un régime séparatiste.
Même si le règlement européen UE N°2016/1103 du 24 juin 2016 met fin à la règle de la mutabilité automatique du régime matrimonial (prévue à l’art 7 de la convention de la Haye n° 25 du 14 mars 1978), le droit international privé français maintient une exception pour les époux mariés entre le 1er Septembre 1992 et le 29 Janvier 2019.
Pour notre couple marié en 2010, la mutabilité automatique perdure donc. N’ayant pas choisi expressément la loi anglaise, il va être soumis à nouveau automatiquement à la loi française à son retour en France. Il dépendra ainsi du régime légal français de la communauté de biens réduite aux acquêts, et l’ensemble de ses biens tombera de facto dans le « pot commun ».
De ce fait, si un des époux décide par la suite d’acheter seul un bien (un appartement locatif par exemple), ce bien dépendra de la communauté même si cet époux l’a financé au moyen de ses revenus personnels.
Comment y remédier ? Voici la préconisation en « droit international de la famille » de votre avocate Sylvie Mombellet
Empêcher la mutabilité automatique du régime de produire ses effets, c’est possible ! À condition de faire preuve d’anticipation ! Car il faut dans ce cas agir avant le retour en France en désignant juridiquement la loi anglaise, loi de résidence de époux (art.22 du règlement de 2016), comme loi applicable, et ceci avec un effet de rétroactivité au jour du mariage. Les époux pourront alors conserver le régime de séparation des biens jusqu’à la dissolution de leur union, qu’elle intervienne par divorce ou par décès.
Sans cette démarche préalable au déménagement, les époux verront s’appliquer la mutation automatique de leur régime vers celui de la communauté de biens réduite aux acquêts, applicable par défaut en France. Lors de la dissolution de leur mariage, il faudra alors liquider deux régimes matrimoniaux, celui de la séparation de biens, résultant de leur « période anglaise » et celui de la communauté du droit français, appliquée depuis leur retour.
Des effets (in)désirables qu'il convient de connaître et de mesurer pour faire le meilleur choix, avant de prendre attache auprès d'un avocat.